BDSM: La Princesse Guerrière
La princesse guerrière, ou le prince guerrier, est un type de soumission que j’ai assez récemment découvert. Décrite par Michael Makai dans son livre « The warrior princess submissive » (2014), elle représente une catégorie de soumise encore beaucoup trop méconnue. En apprendre plus sur elle a été, pour moi, une véritable révélation qui a tout changé dans ma dynamique. J’utiliserai le féminin pour la soumise et le masculin pour le Dominant dans ce texte pour alléger la lecture, mais le profil peut tout autant s’appliquer à tous les sexes confondus.
Pourquoi elle/lui?
Avant de vous expliquer pourquoi j’ai choisi d’écrire un article sur ce type de soumise, une mise en contexte est nécessaire pour en comprendre tout l’intérêt pour moi. Vous pouvez aisément passer tout droit cette partie plus personnelle de l’article, mais je crois que plusieurs personnes pourraient se reconnaitre dans cette tranche de vie, voilà pourquoi je vous la partage.
Je fais partie de la communauté BDSM depuis environ 4 ans, bien que j’aie la flamme en moi depuis l’enfance. J’ai mis longtemps à comprendre ce que je suis exactement et cette incompréhension a été au cœur de nombreux obstacles dans l’évolution de ma dynamique avec mon Dominant.
La découverte du BDSM, via les histoires hautement critiquées d’une certaine Anastasia et d’un certain Grey, a été pour moi le point de départ de mon histoire. Bien que je ne m’identifiais pas à cette réalité que je trouvais abusive et violente, je reconnaissais chez moi certaines envies et fantasmes. Ainsi, j’ai pu faire quelques recherches autour du vocabulaire BDSM. J’ai ouvert la boite de Pandore.
En 2016, j’ai rencontré mon conjoint, un Dominant qui s’ignorait à l’époque et qui tentait de refouler ses instincts naturels, qualifiés de déviances perverses par toutes ses anciennes partenaires vanilles. Avec les connaissances que j’avais acquises dans mes lectures, j’avais tout de suite reconnu ce qu’il était. Et je savais que le mien, c’était lui. Je le sentais au plus profond de moi. Ton mon corps, et même mon âme, étaient appelés par lui.
Malgré cette idylle magnifique, notre parcours BDSM a été semé d’embuches et de nombreuses incompréhensions. Nous avons appris côte à côte, en essayant de forger notre identité de soumise, et de Dominant dans son cas. J’ai fait de nombreuses lectures, nous avons fait de nombreuses rencontres, sans parler toutes les discussions sur les réseaux sociaux. Nous avons fait un constat : je ne me comportais pas comme une soumise classique. Il n’arrivait à rien avec moi avec des méthodes communes. Nous nous sommes même mis à douter tous les deux, chacun de notre côté, que cet univers était vraiment fait pour moi. J’ai commencé à penser que je n’étais pas vraiment une véritable soumise, malgré toute ma volonté d’être à ses pieds à Lui. Je n’étais pas certaine d’être Dominante non plus, bien que visiblement, plusieurs personnes m’ont demandé de les dominer, argumentant que je dégage cette dominance naturellement. Je n’étais pas Switch non plus, parce que jamais il ne me viendrait à l’esprit de le dominer, ni même d’interchanger les rôles avec qui que ce soit. Chacun avait sa place et son rang dans ma tête. Le flou, autour de ce que j’étais, prenait une ampleur démesurée. Je n’étais rien, ni personne dans cet univers. Un électron libre. Perdu.
Puis, un jour, nous avons assisté ensemble à une formation en ligne sur le « dirty talk », incluant une partie plus BDSM sur l’humiliation verbale. J’ai réalisé que je pensais à tort aimer l’humiliation. Encore une chose que je ne faisais pas comme les autres. Ça en était trop pour moi. Je sais que je ne devrais pas chercher à entrer dans un moule, mais heureusement, continuez de lire, le dénouement aura été payant quand même. De toute manière, quand vous allez découvrir la Princesse Guerrière, cette volonté de bien faire chez moi vous paraitra tout à fait évidente et logique.
Je me suis mise à chercher sur le web ce que je suis. Si je n’aime pas l’humiliation, si je ne réponds pas comme les autres à la discipline classique et toutes les autres petites choses que je vis depuis mes débuts dans le BDSM sans les comprendre, suis-je vraiment une soumise?
J’ai épluché des catégories de soumises. Je ne me retrouvais nulle part. Jusqu’à ce que je tombe sur un article, plus marginal, qui expose une soumise de plus que les autres. Quelques lignes seulement pour en parler, mais ces quelques mots m’ont frappé de plein fouet : c’est moi! La princesse guerrière. Un auteur était mentionné : Michael Makai. En trois clics, j’achetais son livre sur le sujet. En moins de 24 heures, je l’avais lu en entier, les larmes aux yeux.
De nombreuses discussions ont suivi entre mon Dominant et moi afin de mieux comprendre toutes les implications de cette découverte sur notre dynamique et d’effectuer les ajustements nécessaires.
Je vous livre donc le résumé de ce livre d’environ 165 pages (The Warrior Princess Submissive, par Michael Makai, en vente sur Amazon Kindle et en format broché), mais je vous invite tout de même à en faire une lecture complète pour aller plus loin dans vos connaissances, si ce type de soumission vous interpelle.
Ses caractéristiques principales
L’auteur Michael Makai a décrit, dans ses ouvrages précédents, plusieurs types de soumises qui sont largement reconnues par la communauté. Par exemple, l’esclave, la brat, la masochiste et j’en passe. La princesse guerrière ne correspond à aucune d’entre elles totalement, bien qu’elle partage des ressemblances avec certaines autres catégories. Elle est clairement atypique et peu commune, voilà pourquoi aussi peu d’ouvrages sur le BDSM parlent d’elles. Il est possible qu’une Princesse Guerrière ne possède pas toutes les caractéristiques présentées par l’auteur, il le mentionne lui-même, mais la majorité seront présentes et si vous la reconnaissez, vous ferai des signes de tête affirmatifs presque tout le long de la lecture.
Une des premières caractéristiques qu’on remarque tout de suite chez elle, c’est sa force intérieure. Elle peut être mentale, émotionnelle, physique ou même dans ses capacités intellectuelles. Une chose est certaine, c’est une battante d’une force inouïe et elle ne s’en cache absolument pas. Au contraire, elle en est fière et elle porte sa force sur elle comme on porterait un vêtement, bien en évidence. Elle se bat pour ce qui est juste pour elle, et elle écartera tout ce qui se trouve en travers de son chemin. En ce qui concerne son Dominant, elle ne se bat pas pour lui, ni contre lui, mais elle le fait pour la justice, avec lui, à ses côtés. Cette dimension de la dynamique est importante puisqu’elle installe une relation plus près de l’esprit d’équipe que du rapport de force.
Elle est très autodisciplinée. Puisqu’elle possède cette grande force, et souvent un grand pouvoir dans sa vie pour l’accompagner, elle en comprend toute la responsabilité et elle mettra tout en œuvre pour être à la hauteur de ces responsabilités. Elle sait que personne ne pourra le faire à sa place, pas même son Dominant, et loin d’elle l’idée de toute manière de lui faire mener ses batailles à sa place. Elle veut le faire seule. Elle ira quérir son aide seulement lorsqu’elle aura épluché toutes les solutions possibles, même les plus farfelues. Le Dominant qui tentera de « casser » ou de discipliner une Princesse Guerrière sans son consentement explicite obtiendra au mieux une énorme dose de frustration et d’humiliation, et au pire… vous ne voulez pas voir ça.
À première vue, la Princesse Guerrière a une tendance « switchy ». Par sa grande force et sa discipline, tout le monde la verra avec une attitude de Dominante dans ses interactions, sauf avec son propre Dominant. Elle est tout à fait capable de dominer, elle est même talentueuse dans ce rôle. Après tout, c’est ce que tout le monde perçoit d’elle de toute manière. Cette capacité à remplir les deux rôles avec autant de brio est non seulement rare, mais elle est également en grande partie la cause des doutes de cette soumise sur elle-même. D’ailleurs, elle souffre souvent du syndrome de l’imposteur dans le milieu BDSM. D’une part, elle est forte, disciplinée, courageuse, elle réussit tout, des caractéristiques qu’on associe classiquement aux Dominants. Malgré tout, dans son cœur, elle demeure une soumise, celle de l’unique Dominant qu’elle aura choisi et qui sera à sa hauteur, celui auquel elle s’agenouillera et s’y sentira à sa place et c’est là toute la différence avec les autres types, dont la Switch classique. Ces pôles opposés seront la source de tous ses doutes.
Elle est férocement indépendante et tête de mule. Elle ne demande l’aide de personne et peut très bien se débrouiller toute seule. Elle n’a besoin ni d’un sauveur, ni d’un chevalier servant, encore moins d’un père. Elle a beaucoup de mal à lâcher prise et à déléguer, mais elle pourra peut-être l’apprendre avec le temps, en gagnant en maturité.
Sa compétence exceptionnelle dans tout ce qu’elle entreprend est frappante. Non, elle n’est pas bonne dans tout, absolument pas. Mais pour elle, la médiocrité n’a pas sa place dans sa vie, donc elle n’entreprendra jamais une chose qu’elle ne pourra pas réussir avec brio. De plus, si la tâche est difficile, elle déploiera même tous les efforts possibles pour que ça ait eu l’air facile aux yeux du monde. En raison de cette compétence, elle exerce souvent des métiers de gestion, d’enseignement ou encore ayant une grande dose de responsabilités.
La Princesse Guerrière est une grande militante. Elle n’a pas peur des bonnes batailles, au contraire, elle les adore. Elle les cherche même. Elle est née pour se battre et argumenter. Elle souhaite changer le monde et gare à celui qui se trouve en travers de son chemin, il sera éviscéré. La bonne nouvelle, c’est qu’elle ne vous estimera pas moins pour cet affrontement. Au contraire, elle apprécie les esprits vifs qui savent se dresser contre elle, qui ont ce pouvoir de persuasion et cette intelligence. Vous pourriez même sincèrement piquer son intérêt en le faisant. Par contre, si vous vous battez contre une Princesse Guerrière, soyez préparés, sinon vous risquez de subir une incroyable humiliation.
Sa boussole morale prend également une importance capitale dans sa vie. Elle a ses idéaux, elle y tient et elle considère le monde sur son axe du bien ou du mal, même si elle ne se décrit pas elle-même comme une personne avec une forte tendance morale. Elle le dégage malgré elle. Elle défendra le bien de toutes ses forces.
Dans sa relation D/s principale, elle est surtout orientée vers le service de son Dominant. Un peu comme le chevalier guerrier au service de sa reine, la Princesse Guerrière souhaite faire tout en son possible pour bien servir son Dominant et le protéger. Elle ressemblera parfois à une domestique, un meuble ou encore à une esclave sexuelle, en autant qu’elle « serve » les besoins de son dominants, d’une manière surtout utilitaire, dans un but précis. Elle ne se qualifie toutefois pas d’une femme de maison classique, et elle ne supporte pas du tout l’humiliation. Elle ne se perçoit pas non plus comme un objet qu’il peut prêter à sa guise à d’autres. Elle ne prête cette autorité qu’à une seule et unique personne.
Finalement, elle est très furtive dans sa vie de soumise. Dans le monde vanille, elle ne se présente que très rarement comme une soumise. Elle a tendance à cacher cette nature en raison de la trop grande dissonance entre sa dominance publique et sa soumission privée.
Ce qu’elle n’est pas et pourquoi
Elle n’est pas une brat. Bien qu’elle soit extrêmement forte, déterminée et têtue, voire impossible à discipliner, la Princesse Guerrière n’a rien d’une Brat. Elle ne tire aucun plaisir dans la désobéissance, ni même dans les punitions. Elle peut parfois être en désaccord avec son Dominant, elle appréciera même un bon débat d’opinion intelligent, mais elle ne prend pas plaisir à le contredire ou le provoquer.
Elle n’est pas une pseudo soumise. Les pseudos soumises sont habituellement centrées sur leurs propres besoins, elles ne servent personne d’autre qu’elles-mêmes. La Princesse Guerrière se bat avec son dominant, pour la justice, et non contre lui pour ses propres intérêts comme le fait la pseudo soumise. La pseudo soumise n’a aucune discipline, que des excuses illogiques pour se défiler. La Princesse Guerrière est tout le contraire : logique, disciplinée, compétente. Lorsque le Dominant doit discipliner une Princesse Guerrière dans les mesures négociées pour leur dynamique, elle accepte humblement. La pseudo soumise, elle, l’accusera plutôt à la première occasion de faire de l’abus de pouvoir si elle n’a pas envie de se conformer.
Elle n’est pas une Switch. Classiquement, une personne Switch est décrite comme ayant la capacité de changer à volonté de rôle sur l’axe de la domination et de la soumission. La Princesse Guerrière est avant tout une soumise de son Dominant et jamais elle ne cherchera à inverser cette dynamique avec lui, ni inverser sa dominance envers le reste du monde pour leur être soumise. Elle pourra jouer temporairement le rôle d’une bottom si c’est nécessaire pour poursuivre ses objectifs (formation, expérimentation, perfectionnement, etc), mais elle ne se soumettra aucunement.
Ses motivations
De manière générale, elle est souvent décrite comme une personne qui a « de la drive ». Elle fait tout très intensément et n’oubliez pas qu’elle est en plus, très compétente dans ce qu’elle fait. Ce qui motive principalement la Princesse Guerrière dans sa vie, se situe dans quatre domaines principaux.
1. Le service. Elle ne sert pas seulement son Dominant, elle va servir le monde entier. Elle veut se sentir utile aux causes qu’elle aura choisies, le bonheur de son Dominant en étant une en soi. Elle sacrifiera facilement son temps, son énergie et ses ressources pour servir. Il n’est pas rare de la voir faire par exemple du bénévolat pour des organismes communautaires ou prendre part à de grandes manifestations ayant pour but de faire changer les choses. Elle va même souvent perdre de vu ses propres besoins au profit de ceux pour lesquels elle aura choisi de se battre.
2. La perfection. La Princesse Guerrière a un besoin profond d’être parfaite. Cette volonté d’être parfaite sur les plans physiques, intellectuels, émotionnels ou même sexuels, la poussera même à adopter des comportements qui peuvent devenir dangereux pour elle-même. Elle repousse ses limites le plus loin possible, toujours. Elle veut être la meilleure et pour y arriver, elle n’a pas peur de l’échec, qu’elle percevra comme le chemin nécessaire pour arriver à la réussite. Son perfectionnisme n’est pas maladif, il est logique, calculé, mesuré et elle mettra tout en œuvre pour arriver à ses fins. Si elle s’en sent incapable, elle n’entreprendra pas cette tâche, tout simplement. C’est tout ou rien. C’est excellent, ou rien du tout. Pas de place pour la médiocrité chez elle.
3. L’affiliation. Son besoin d’appartenance est très important. Elle montre au monde une facette d’elle-même qui constitue une sorte de carapace ou de mur qui masque sa vraie personnalité, mais quand elle laisse entrer quelqu’un dans son cœur et son univers, elle le fait pleinement, corps et âme. Par conséquent, elle chérira de tout son être cette affiliation et en prendra le plus grand soin en offrant non seulement sa loyauté, mais aussi, elle sera fiable et dévouée. C’est une amie et une amoureuse hors pair puisque peu de personnes ont pu revendiquer avoir eu ce privilège. Si l’autre personne ne lui renvoie pas la même implication émotionnelle dans la relation, elle en souffrira terriblement.
4. La droiture. Son sens du bien et du mal est hyper développé. Cette notion guide beaucoup de ses décisions dans sa vie et la poussera à mener de nombreuses batailles. Elle-même si elle n’émet de jugement envers une personne, ça ne veut pas dire qu’elle refusera de se battre contre cette personne. Au contraire, elle se réjouira de cet affrontement et elle dansera devant la défaite de son ennemi. Ce n’est rien de personnel, mais cette personne ira à terre, d’une manière ou d’un autre.
Ce qu’elle recherche chez son Dominant
Elle attend énormément du Dominant qu’elle aura choisi. Parce qu’elle est aussi forte et compétente elle-même, elle ne s’attend pas à se soumettre à un simple Dominant puisqu’elle en a elle-même plusieurs caractéristiques. Elle veut le Dominant des Dominants, celui à l’extrémité du spectre D/s et elle est très exigeante. Pas de place pour les personnes hésitantes, les « wanna be » ou les jeux de rôles. Elle veut le vrai de vrai. Chaque partenaire potentiel qu’elle va rejeter la rapproche un peu plus de son objectif de trouver LE Dominant, « The One ».
Elle recherche une personne qui ne craint pas la force, l’intelligence et la compétitivité, mais qui y est au contraire attirée. Une personne qui ne cherchera pas à éteindre chez elle ses caractéristiques, mais qui va savoir jongler avec elles. Cette personne doit également être compétente dans ce qu’elle entreprend. Comme ça a été dit, la médiocrité lui répugne, autant chez elle que chez les autres. Le Dominant devra aussi être un battant et un militant. Pas nécessairement pour les mêmes causes qu’elle, mais elle devra identifier en lui cet allié guerrier et combattif dont elle a besoin. Elle aime qu’il soit articulé, capable d’avoir une bonne discussion et débattre sans se sentir blessé ou humilié au moindre désaccord. Elle a besoin d’être mentalement stimulée et mise à l’épreuve. En échange de tout ça, elle lui sera entièrement dévouée de tout son cœur, son corps, son esprit, et même son âme.
En conclusion…
J’espère de tout cœur que cet article vous aura permis de mieux connaitre ce type de soumission, de la comprendre et peut-être même avez-vous senti la même libération que moi en la découvrant. J’espère qu’elle sera mieux connue, mieux comprise et que les Princesses Guerrière et les Princes Guerriers se sentiront moins comme des imposteurs grâce à ces mots. J’en fais ma petite croisade personnelle.
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